- La Tête des Chétives 2644m en traversée entre les Lacs Gary et Labarre

Publié le 1 août 2023 à 15:26

Réalisée le 30-31 juillet 2023

 

On délaisse les hautes cimes des Ecrins pour arpenter les doux reliefs de la périphérie du massif. De même, nous ne côtoierons pas les immenses lacs aux multiples nuances de bleu qui font la renommée des randonnées dans le Haut-Dauphiné. En s'écartant des sentiers battus du coeur du massif, des itinéraires encore peu connus peuvent nous permettre de profiter de vues quelque peu inédites sur les cimes des Ecrins.

Coincé entre le Valbonnais et le Valjouffrey, le sous-massif de l'Arcanier s'érige modestement face aux premiers 3000 du Nord des Ecrins. Cette crête majoritairement herbeuse s'échappant vers le Sud-Ouest depuis le Signal du Lauvitel peu cacher quelques joyaux lacustres, en partie épargnés par les nombreux randonneurs foulant le GR54.

D'une altitude relativement modeste - aux alentours de 2500-2600m - ce sous-massif ne se gravit pour autant pas sans efforts, au contraire. Uniquement atteignable depuis les quelques villages qui parsèment le pied de ces montagnes : Entraigues, Valsenestre ou encore Le Perier. C'est depuis ce dernier que notre aventure commence. Il s'agit d'ailleurs du seul village permettant une boucle parfaite sur cette partie du Massif des Ecrins.

L'objectif de la randonnée est de réaliser une traversée entre les deux lacs présents dans cette zone : le Lac Gary et le Lac Labarre. Bien que non indiqué sur les cartes IGN, un sentier d'arêtes permet de relier ces deux lacs, avec comme point haut la Tête des Chétives 2644m. Depuis Le Périer, à à peine 900m d'altitude, on se prépare à gravir les 1600m de dénivelés positifs qui nous séparent du Lac Gary, premier intermédiaire de cette randonnée.

 

Jour 1 : Du Périer au Lac Gary.

 

 

Le petit village du Périer est blotti au fin fond du Valbonnais. D'un côté les premières pentes des Ecrins, de l'autre l'immense muraille du groupe montagneux du Grand Armet, appartenant au Massif du Taillefer. Peu de temps après avoir quitté les dernières habitations, on pénètre dans le Parc National des Ecrins.

 

Les orages de la veille ont humidifié les pentes alpines. Le retour des chaleurs estivales permet le développement de nombreux cumulus orographiques, inoffensifs ce jour-ci.

 

 

L'ascension est progressive dans un dense sous-bois. Les lacets s'enchainent puis, aux alentours de 1700m d'altitude, on atteint une petite clairière où trône la Cabane des Drayes. L'écartement des nombreux conifères peuplant les lieux laissent apparaitre le Sud du Massif du Vercors et notamment le Mont Aiguille qui se débat dans la nébulosité.

 

L'alpage de la Cabane des Drayes face au chaînon du Grand Armet.

 

 

Après la cabane, on alterne de manière plus récurrente les parties forestières et les traversées d'alpages, signe que nous prenons de l'altitude. On commence à sensiblement dominer le Valbonnais et ses quelques villages encerclés de champs agricoles.

 

Au passage du Col Blanc, à un peu plus de 2100m, la vue se dégage vers le Sud-Ouest. Le Massif du Dévoluy se dévoile avec notamment son point culminant : la Grande Tête de l'Obiou 2789m.

 

 

Depuis le Col Blanc, on poursuit notre ascension en direction de la Brèche de Gary. Face à nous, l'Arcanier 2576m, premier grand sommet de ce sous-massif des Ecrins. Au fur et à mesure, les cumulus s'estompent au-dessus des Alpes, remplacés par quelques cirrus de haute altitude.

 

 

En s'approchant de la Brèche de Gary, la végétation se fait de plus en plus rare. Les pierriers envahissent davantage les pentes de l'étage alpin, ne laissant que peu de place aux quelques fleurs qui profitent des douceurs estivales. De ce côté là du massif, l'eau est peu présente. Il ne faut pas hésiter à remplir ses gourdes aux dernières sources présentes sur l'itinéraire, au niveau de la Cabane des Drayes.

 

 

Depuis la Brèche de Gary 2487m, on surplombe le petit lac éponyme qui jouit d'une sublime vue sur la partie occidentale des Ecrins. Du Signal du Lauvitel à gauche, jusqu'à l'Olan à droite, on fait face aux premiers 3000 du massif. L'hostilité de ces cimes contrastent avec le calme et la douceur des alpages entourant le Lac Gary.

 

Légèrement en amont sur la gauche du Lac Gary, une petite cabane trône au milieu de l'alpage. Continuellement ouverte, la Cabane du Lac Gary peut servir d'abri pour y passer la nuit. Cependant, le berger du coin est censé y prendre ses quartiers d'été, ce qui, au vu de l'absence de troupeau dans l'alpage, ne semble pas être le cas en ce moment même. On ira donc y jeter un oeil pour savoir si ce baraquement concurrence la confort de notre tente de bivouac.

 

De la Tête de la Muraillette à gauche à l'Aiguille des Marmes à droite en passant par le Pic du Clapier Peyron, la Roche de la Muzelle, la Pointe Marguerite et la Pointe Swan. Au niveau du Col de la Muzelle, séparant le Pic du Clapier Peyron de la Roche de la Muzelle, on devine la Meije pointant le bout de son nez.

 

Un dernier clin d'oeil vers l'Ouest et le Trièves. Au loin, la barrière orientale du Vercors d'où l'on devine le Grand Veymont et la Grande Moucherolle.

 

 

On laisse de côté l'Arcanier pour nous rendre directement vers le Lac Gary et sa cabane. Personne à l'horizon, pas de troupeaux, pas de patous, l'alpage est à nous.

 

La Cabane du Lac Gary et le Pic Vert.

 

L'intérieur de la Cabane du Lac Gary est relativement rustique : deux planches de bois superposées en guise de couchage, un poêle et une petite table. Le temps calme prévu pour cette nuit nous convainc donc de privilégier la tente pour cette fois-ci.

Avant d'installer le bivouac, on se rend sur les rives du Lac Gary afin de s'y laver mais également pour y faire le plein d'eau pour la nuit.

 

 

La source du Lac Gary semble s'être tarie, faisant légèrement baissé le niveau du lac mais permettant à ses eaux d'être relativement tièdes. D'ailleurs, l'eau ne s'écoule plus en aval du lac. De l'autre côté de celui-ci, l'Olan 3564m s'érige au loin entouré de l'Aiguille des Marmes 3046m et du Pic de Valsenestre 2752m.

 

 

On part ensuite installer notre bivouac légèrement en amont de la Cabane du Lac Gary, sur une butte herbeuse surplombant le Valjouffrey. Au loin, le Vieux Chaillol et le Sud du Dévoluy composent l'arrière plan.

 

Il ne nous reste plus qu'à patienter pour voir si, malgré le voile nuageux, le coucher du soleil nous réserve quelques surprises.

 

En quelques dizaines de minutes, les sommets des Ecrins s'enflamment.

Le Vieux Chaillol et l'Olan.

 

L'ombre de l'Aiguille des Marmes se pose sur la face Nord de l'Olan.

 

De la Roche de la Muzelle à l'Aiguille des Marmes.

 

Puis, alors que les dernières lueurs effleurent encore la Roche de la Muzelle et l'Olan, c'est au tour du ciel de resplendir.

 

Le Vieux Chaillol et la Lune.

 

Sur l'arête surplombant le cirque du Lac Gary, quelques chamois paissent, tout en profitant de ce festival haut en couleur.

 

Alors que les couleurs chaudes s'éloignent vers l'Ouest, la nuit s'avance au-dessus des Alpes. Bientôt, l'obscurité prendra place, en partie contrée par cette Lune quelque peu troublée.

 

Jour 2 : Traversée entre le Lac Gary et le Lac Labarre avant la descente sur Le Périer.

 

Malgré une altitude assez élevée (2400m), la nuit fut plutôt douce. Le réveil de 6h nous permet d'ouvrir la tente pour les premières lueurs matinales. Et encore une fois, le ciel alpin nous surprend.

 

 

Le voile nuageux de la veille n'a pas disparu pendant la nuit. Au lever du soleil, la base des cirrus se colore de rose, d'orange et de jaune au-dessus de la Roche de la Muzelle 3465m.

 

Saupoudrage rosé sur la Tête de la Muraillette et le Pic du Clapier Peyron.

 

Ce spectacle céleste ne durera que quelques minutes. Les couleurs vives laisseront place aux couleurs un peu plus habituelles d'un début de journée.

 

 

Une fois le bivouac démonté, on se rend de nouveau vers le Lac Gary pour se ravitailler en eau. En effet, la première partie de l'itinéraire du jour n'est traversée par aucune source. De retour à la Cabane du Lac Gary, on suit une furtive sente qui monte dans les gradins herbeux en direction des arêtes. Bien que le sentier ne soit pas officiel ou bien tracé, ce dernier ne présente aucune difficulté. Au contraire, nous sommes bercés par le paysage qui se dévoile de plus en plus au Sud. Puis, une fois sur le fil de l'arête, c'est le Nord qui s'élance face à nous.

 

L'Arcanier se reflète dans les eaux calmes du Lac Gary.

 

De l'autre côté de l'arête, les rayons du soleil frappent timidement les massifs encerclant le Trièves.

 

Zoom sur l'extrémité Nord du Dévoluy, le Diois et du Sud du Vercors.

 

Zoom sur le Mont Aiguille et le Grand Veymont. A droite, on devine La Mure surplombé du dôme herbeux du Sénépy.

 

L

'arête restera large sur toute la traversée. On évolue soit dans des gradins herbeux soit dans des blocs stables. La petite bise ne gâche en rien l'expérience, on profite de ces points de vue sensationnels sur les Ecrins et les massifs environnants.

 

Surveillés par le Grand Ferrand et l'Obiou.

 

Côté Nord, on s'élance du Rocher du Lac à gauche jusqu'au Signal du Lauvitel à droite en passant par le Grand Armet, le Grand Taillefer, la Pyramide, le Grand Galbert, le Pic du Grand Doménon, les trois Pics de Belledonne et la Pointe de Malhaubert.

 

Le Pic Vert 2603m est le premier de la trilogie sommitale que nous allons traverser jusqu'au Lac Labarre. De sa cime, l'entièreté du Massif du Dévoluy est visible ainsi que le petit cirque mi rocheux, mi herbeux du Lac Gary. En direction du second sommet, ce dernier ne sera plus visible.

 

Vers l'Ouest, les sommets sont encore bien éblouis par un soleil poursuivant l'ascension vers son zénith. L'Aiguille du Plat de la Selle s'aperçoit quelques minutes au niveau du Col de la Muzelle.

 

La Tête de l'Ane 2585m marque le second sommet de la traversée.

 

Une fois la Tête de l'Ane franchie, on descend d'une centaine de mètres mais toujours en suivant le fil de l'arête jusqu'à un col sans nom. De là, on entame l'ultime grimpette en direction de la Tête des Chétives, le culmen de ce petit chainon.

 

La Tête des Chétives 2644m (ou Tête de Rame)

 

Des dizaines de chamois sont présents de part et d'autre de l'arête. Ils savent que peu de monde arpente cette zone et la luxuriance des lieux les convainc davantage à rester sur ces crêtes. Plutôt cachés sur le flan Nord de la montagne, les quelques individus présents sur l'arête détalent à notre arrivée.

 

Quelques Asters des Alpes sur l'arête de la Tête des Chétives.

 

Alors que l'Olan disparait quasi totalement derrière l'Aiguille des Marmes, le Sirac et le Pic des Souffles le relaient en direction du Sud.

 

Depuis le sommet de la Tête des Chétives 2644m : de l'Ouest des Ecrins au Sud du Massif du Taillefer en passant par le Dévoluy, le Diois et le Vercors.

 

Sous le Signal du Lauvitel 2901m, le Lac Labarre profite des premiers rayons du soleil. Tout à gauche, le Pic du Lac Blanc et le Glacier de Sarenne apparaissent au loin.

 

 

Il ne nous reste plus qu'à dévaler l'arête herbeuse de la Tête des Chétives en direction du Col de la Romeïou. Là encore, les 200m de dénivelés négatifs ne présentent aucune difficulté. On profite de la délicatesse des alpages et de l'ambiance estivale sur ces derniers mètres modestement aériens.

 

Un peu avant le col, la nuée de chocards remplace les hordes de chamois.

 

Tête des Chétives et chaînon du Grand Armet.

 

Lac Labarre.

 

Au Col de la Romeïou, on ne prendra pas la peine de descendre près du Lac Labarre. La suite de l'itinéraire se poursuivant en sens opposé. On met pied sur le GR54B, une variante du Tour de l'Oisans et des Ecrins. Dans un premier temps, on traversera en balcons le flan Ouest du Signal du Lauvitel en direction des alpages de la Cabane de la Selle avant de chuter en direction du Valbonnais.

 

Dernier clin d'oeil au Dévoluy, notamment au Plateau de Bure.

 

La suite de l'itinéraire emprunte les pentes ombragées de droite. Sur les cartes IGN ce sentier est dit délicat car il traverse de nombreuses ravines et le vide n'est jamais bien loin. Mais par temps sec et ensoleillé le danger est totalement absent.

 

La Tête des Chétives, le Mont Aiguille, le Grand Veymont et le Coiro.

 

La face Nord de la Tête des Chétives diffère grandement de sa face Sud, herbeuse et peu abrupte. Sur l'extrémité droite de la photo, on devine le village du Périer, départ et terminaison de notre randonnée.

 

Face à la Pointe de Confolens 2990m et à l'immonde ligne à haute tension qui franchie la Brèche du Périer. Lors de la descente, on suivra grosso modo les fils électriques, mais la forêt et l'ambiance montagnarde nous les feront oublier en partie.

 

Dans un premier temps on retrouve le mélézin, puis les pins cembro et les bouleaux prendront la suite. En passant près de la Cabane de la Selle, on croise la source du Torrent de Tourot. Malgré quelques fines lames d'eau entre le Col de la Romeïou et la Cabane de la Selle, il s'agit de la première véritable source d'eau depuis notre départ du Lac Gary.

 

On plonge vers le talweg du vallon en effectuant de larges virages en sous-bois. Mais plus l'on descend, plus la chaleur se fait pesante. La moyenne montagne n'est pas protégée des fortes chaleurs estivales.

 

 

De nouveau dans la forêt, on croise les quelques bâtisses qui composent les petits Hameaux de Confolens. A Confolens-le-Bas, on retrouve la route que l'on longera sur deux kilomètres dans le but de relier le village du Périer. Ces habitations sont présentes dans le vallon depuis le XIXème siècle et permettaient l'exploitation de ce dernier, notamment du bois. Avec l'exode rural et la création du parc national, des actions de reboisement ont été entreprises sur la partie haute du Vallon du Tourot. Le retour de la forêt a permis un endiguement de l'érosion, le retour des cours d'eau dans leur lit naturel et un meilleur épanouissement des espèces sauvages comme les ongulés et les tétras-lyres. Il ne reste plus qu'à se débarrasser de cette ligne à haute tension et la lecture des paysages du Vallon du Tourot sera pleinement restaurée.

Une vingtaine de kilomètres et 2000m de dénivelés positifs comme négatifs permettent de profiter d'une grande variété de paysages. Bien que la haute montagne ne soit pas l'objet de cette randonnée, les points de vue sur les hautes cimes des Ecrins depuis les lacs comme depuis les arêtes dégagées sauront vous combler. Quelques similarités sont associées entre ce parcours et le Plateau d'Emparis : alpages, lacs, vallées profondes, vues sur les sommets des Ecrins. Bien que cette fois-ci, on se situe bel et bien dans le coeur du Parc National des Ecrins et loin des foules.

 


ITINÉRAIRE DE LA RANDONNÉE : 

 

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