Réalisée le 24-25 septembre 2023.
La haute saison se termine progressivement dans les Alpes. Et voilà que les premières neiges s'installent de manière pérenne sur les hauts sommets et leur face Nord. Au-delà de 3000m, l'hiver alpin tente de s'imposer malgré les tardives offensives estivales. Une brève perturbation a donc saupoudré les cimes des Alpes, sans pour autant apporter des quantités importantes d'or blanc, rendant les cimes, même les plus hautes, encore largement accessibles avec un équipement de randonnée.
Au même moment, les refuges de montagne ferment peu à peu leurs portes, se métamorphosant en sommaires abris d'hiver. Et ce détail mérite d'être relevé. Au-delà du petit confort que ces derniers peuvent procurer - on évite de trimballer la tente sur de longues distances, on échappe aux premières gelées qui envahissent les alpages, on profite d'un certain confort - le passage en mode non-gardé des refuges alpins rend plus attrayant certains massifs.
La Vanoise est un parfait exemple lors de ces inter saisons. En effet, son parc national interdit tout bivouac sur son territoire en dehors des aires à proximité des refuges, rognant quelque peu la liberté du randonneur en quête de tranquillité. Le passage en mode hiver des refuges du massif permet donc de profiter pleinement de cette région sans se retrouver happé par les flux de touristes arpentant les grands itinéraires comme celui du Tour des Glaciers de la Vanoise.
Cette fois-ci, bien que les refuges du Tour des Glaciers ont retrouvé leur tranquillité sauvage, on ne se rendra pas dans le coeur du Massif de la Vanoise mais à son extrémité orientale. Même si le Parc National englobe quelques cimes un peu plus à l'Est, le Col de l'Iseran marque la fin géologique du Massif de la Vanoise et la jonction entre la Tarentaise au Nord et la Maurienne au Sud. De part et d'autre du col, de nombreux 3000 sont accessibles, que l'on se situe dans le Massif des Alpes Grées ou celui de la Vanoise.
L'ultime géant de la Vanoise se trouve être la Pointe de Méan Martin 3330m. Elle surplombe la station de Val d'Isère d'un côté et le village de Bonneval-sur-Arc de l'autre. Et comme pas mal de sommet de plus de 3000m dans le Massif de la Vanoise, un itinéraire de randonnée permet d'accéder à son cairn sommital. Il ne reste plus qu'à savoir si le peu de neige tombé ces derniers jours rend cette ascension plus périlleuse.
L'itinéraire de randonnée conduisant à sa cime se situe sur le versant Nord de la montagne, du côté de Val d'Isère. Après avoir traversé la station, on remonte, toujours véhiculé, le petit Vallon du Manchet. Au niveau du télésiège éponyme, on gare la voiture et on peut commencer à s'échapper vers le coeur du Parc National de la Vanoise.
Jour 1 : L'ascension de la Pointe des Fours par les Cols des Fours et de Bézin.
A quelques encablures du domaine skiable de Val d'Isère, on trouve le tout premier refuge du Massif de la Vanoise : le Refuge du Fond des Fours. Bien que proche de la station, on se situe déjà dans le parc national. A peine 600m de dénivelés séparent le fond du Vallon du Manchet du refuge. C'est pourquoi on s'autorise l'ascension de la Pointe des Fours en guise d'échauffement pour la montée du lendemain.
Dès le départ, la reine des lieux se dresse vers le Nord : l'Aiguille de la Grande Sassière 3747m.
Le casse-croûte du loup. A gauche, on aperçoit la Pointe de Bellevarde 2827m.
Une fois les ruines du hameau du Manchet passées, on remonte tranquillement le Vallon des Fours et son torrent. Dès les premiers mètres on pénètre dans le Parc National et les indices de la présence de la station de ski dans les environs s'amenuisent peu à peu.
Les marmottes sont encore présentes en nombre dans les alpages.
En une petite heure et demi on atteint le Refuge du Fond des Fours 2537m. On fait ainsi face à l'objectif du lendemain : la Pointe de Méan Martin. Cette dernière semble bien pétrie de neige. Mais le soleil cogne. Peut-être aura-t-il raison de cette fine couche de neige.
On ne prend pas le temps de visiter le refuge, on poursuit directement vers la Pointe des Fours. On remonte encore un peu le vallon avant de bifurquer vers la gauche pour rejoindre le Col des Fours.
Derrière le refuge, le Mont Pourri, le Massif du Mont Blanc et l'Aiguille de la Grande Sassière forment l'arrière-plan.
Quelques chamois (voir sur la droite) déguerpissent à notre arrivée sur les premières pentes du Col des Fours.
Alors que le minéral commence à l'emporter sur le végétal, la Pointe de la Sana, la Grande Casse et la Grande Motte s'érigent à l'Ouest.
Au Col des Fours 2976m, on surplombe le Lac de l'Ancien Glacier du Fond, s'en suit la Vallée de la Maurienne et les géants des Alpes Grées tels que l'Albaron 3637m ou encore la Grande Ciamarella 3676m. De nombreux glaciers sont également visibles : Mulinet, Grand Méan, Vallonnet.
Pour rejoindre la cime de la Pointe des Fours, il faut suivre l'arête partant vers le Sud depuis le col. On ne suit pas fidèlement le fil de l'arête, on évolue plutôt sur le versant occidental de la montagne. Un timide sentier permet d'atteindre le sommet sans aucune difficulté.
Sur le sentier schisteux de la Pointe des Fours.
Alors que la neige fait son apparition, un Lagopède alpin nous accompagne jusqu'au sommet.
La Pointe de Méan Martin 3330m depuis la Pointe des Fours 3072m.
Le panorama de la Pointe des Fours est assez exceptionnel. Malgré la présence de nombreux sommets largement plus hauts que cette dernière, les différents massifs alentours se découpent dans le paysage à commencer par celui de la Vanoise et des Alpes Grées.
Cette montagne est assez courue, notamment sur son versant oriental. En effet, on y accède facilement depuis le Col de l'Iseran perché à 2700m d'altitude.
L'Albaron et le Lac de l'Ancien Glacier du Fond.
Panorama sur les Alpes Grées : de la Levanna à gauche à la Pointe de Charbonnel 3752m à droite (point culminant du massif).
Côté Vanoise, on démarre des Pointes de la Frêche à gauche jusqu'à la Grande Motte à droite en passant par le Grand Roc Noir, la Dent Parrachée, le Dôme de l'Arpont et de Chasseforêt, le Mont Pelve, la Pointe de la Sana, la Pointe Mathews et la Grande Casse.
Du Mont Blanc 4805m à gauche à la Pointe Francesetti 3425m à droite en passant par l'Aiguille de la Grande Sassière, le Pélaou Blanc, la Tsanteleina, le Signal de l'Iseran, la Pointe du Montet et son petit Glacier du Pissaillas, Ouille Noire, les Levanna et le Roc du Mulinet.
Massif du Mont Blanc, Grande Sassière et Tsanteleina.
Vue d'ensemble sur le bassin du Glacier des Fours.
Initialement prévu en aller-retour, on devine depuis le sommet de la Pointe des Fours une petite sente qui traverse le pierrier en contrebas du sommet en direction du Col de Bézin, un peu plus au Sud. On s'attelle donc à rejoindre ce sentier pour effectuer un circuit et rejoindre les moraines du Glacier des Fours.
Le Col de Bézin se situe entre le Pointe Nord (à gauche) et la Pointe Sud de Bézin (au centre). Sur les cartes topographiques, aucun sentier n'est indiqué si ce n'est quelques itinéraires de ski de randonnée.
Tranquillement, on rejoint les champs de pierres du Col de Bézin 2929m. A droite, la Pointe des Fours domine cet environnement désertique.
On rejoint à vue le lac sans nom en gardant un oeil sur les géants de la Vanoise : Pointe de la Sana, Grande Casse, Grande Motte, Bellecôte, Mont Pourri.
Plus l'on perd de l'altitude, plus la Pointe de Méan Partin s'impose dans le paysage. La Pointe de Méan Martin correspond bien à la pointe rocheuse de droite. L'épaule neigeuse de gauche correspond au Signal de Méan Martin 3315m.
Encore à vue, on se dirige vers le fond du vallon. On rejoint ainsi les vastes moraines qui s'apparentent à d'immenses champs de lave. Ici, cela fait plusieurs années que la glace a disparu.
De gros cairns aident à repérer le sentier menant au Refuge du Fond des Fours. Il s'agit du même sentier que nous réemprunterons demain matin pour l'ascension de la Pointe de Méan Martin.
Face Nord de la Pointe de Méan Martin.
Avant d'atteindre le refuge, on retrouve les habitants des alpages.
Le Refuge du Fond des Fours est géré par le Parc National de la Vanoise. Il se divise en trois petits chalets : un pour les gardiens du refuge et les gardes du parc, un autre servant de salle commune et de cuisine et enfin un dernier pour les dortoirs. En mode hiver, les trois chalets sont ouverts même si celui des gardiens est réservé pour les agents du parc. Ainsi, une vingtaine de couchages sont mis à la disposition des randonneurs, bien que le bivouac soit autorisé à proximité immédiate du refuge.
Avant que l'ombre n'envahisse les environs du refuge, on zyeute les quelques chamois paissant dans l'alpage.
Derniers rayons sur la Pointe de Méan Martin.
Jour 2 : L'ascension de la Pointe de Méan Martin et la Traversée des alpages en aval de la Pointe de la Sana.
Le réveil sonne à 5h du matin. On engloutit un maigre petit déjeuner puis on se décide à affronter les gelées matinales qui ont recouvert d'une fine couche de givre les alpages de la Vanoise. La nuit bat encore son plein. On débute donc la marche en direction du sommet à la frontale.
Dès 6h du matin, les premières lueurs bleuissent le ciel. L'Est se réchauffe peu à peu alors que l'on gravit doucement les moraines du Glacier des Fours. Le sentier est toujours bien indiqué par de gros cairns.
On ne butera pas contre la paroi Nord de la montagne. On bifurquera un peu avant vers l'Ouest pour rejoindre l'arête Nord-Ouest de la Pointe de Méan Martin.
Le Glacier des Fours a quasiment disparu de la partie inférieure de la face Nord. Un lac glaciaire et quelques blocs de glaces jonchant le pied de la paroi marquent les derniers indices de sa présence d'autrefois. Il ne reste plus que quelques masses glaciaires se cramponnant à la face Nord du Signal et de la Pointe de Méan Martin.
Tandis que l'on atteint un plateau lacustre, l'atmosphère se réchauffe au-dessus des Alpes. Le Mont Blanc s'apprête à se faire frapper par les premiers rayons du soleil.
C'est chose faite quelques minutes plus tard.
La Pointe de la Sana 3436m et la Grande Motte 3653m suivent le mouvement.
Les quelques lacs du plateau étaient à deux doigts de se retrouver figés en totalité.
Non loin du Col du Pisset, il faut quitter le sentier cairné. On se dirige une nouvelle fois à vue en direction de l'arête Nord-Ouest de la Pointe de Méan Martin. Les cairns sont peu voyants et peu nombreux mais le terrain n'est pas escarpé. Il faut tout de même faire attention à ne pas monter trop haut pour rejoindre l'arête au risque de devoir redescendre pour reprendre pied sur la véritable trace qui suit, dans un premier temps, le dévers de l'arête sur son versant Vallon de la Rocheure. Le plus simple est de rejoindre le cairn du Col du Pisset et de suivre l'arête pour bien identifier le départ de la sente.
Les sommets entourant le Vallon de la Rocheure se parent de jaune.
Embrasement de la Pointe de la Sana et de la Grande Motte. La Pointe de la Sana fait partie des quelques 3000 accessibles en randonnée. Une sente s'élève jusqu'à sa cime depuis le Refuge de la Femma.
Zoom sur le Grand Roc Noir, la Dent Parrachée et les Dômes de la Vanoise. On devine l'ombre du Grand Roc Noir sur le Glacier de Chasseforêt.
Le chainon séparant la Pointe de Méan Martin du Grand Roc Noir (de gauche à droite) : Aiguille de Méan Martin, Pointe des Léchours, Pointe du Châtelard, Pointe de Vallonbrun et Pointes de la Frêche.
Le passage pour atteindre l'arête Nord-Ouest de la Pointe de Méan Martin s'est révélé plus abrupt qu'escompté. Fort heureusement, l'absence de neige et le gel ont rendu le terrain plutôt stable. La présence de neige ainsi qu'une faible visibilité sont à proscrire sur cette partie de l'itinéraire.
Sur le versant Nord, le saupoudrage survit au temps ensoleillé de ces derniers jours.
L'Aiguille et la Pointe de Méan Martin.
A partir de la côte 3100m, on se contentera de suivre le fil de l'arête Nord-Ouest jusqu'au sommet. Cette portion n'est que faiblement enneigée, notamment sur son versant Nord. Il n'y a pas de passages aériens, les 200 derniers mètres se gravissant aisément malgré les picotements de la bise matinale.
Le Massif du Grand Paradis émerge à l'Est.
Sur l'arête, l'hiver semble avoir bel et bien pris l'avantage.
Un peu avant 9h, on atteint le cairn sommital de la Pointe de Méan Martin 3330m. Personne au sommet, même pas un bouquetin ni un chamois. Seulement un horizon de montagnes et les rayons lumineux transperçant la Haute Maurienne. On profite quelques instants de ce 360 entre vallées et sommets.
Vers la Haute Tarentaise séparant Vanoise et Alpes Grées, et jusqu'au Mont Blanc.
De gauche à droite : Rochemelon, la Pointe des Ronces, la Pointe Niblé, les Dents et le Mont d'Ambin, la Pointe du Châtelard, le Mont Pelvoux, les Pointes de la Frêche, le Grand Roc Noir, les Dômes de la Vanoise, et la Grande Casse.
Le Mont Pelvoux, le Pic Sans Nom et Ailefroide se faufilant entre la Pointe du Châtelard et la Pyramide du Vallonbrun.
De l'Aiguille de la Grande Sassière au Grand Paradis en passant par la Tsanteleina, la Dent Blanche, le Cervin et la Grivola.
Le Signal de Méan Martin et la Haute Maurienne.
Plongeon sur la face Nord de la Pointe de Méan Martin.
Centré sur l'Albaron. Derrière cette muraille de sommets, on chute sur le Piémont italien.
On s'apprête à quitter le sommet. Il n'y a pas d'autre option que de reprendre le sentier de la montée pour rejoindre le Col du Pisset. Mais à la suite de cela, nous poursuivrons notre route vers l'Ouest, dans les pierriers puis dans les alpages de l'extrémité orientale du Parc National de la Vanoise. On profitera de ces vastes espaces, dans la solitude et sous un soleil plus estival qu'automnal.
Le magnifique panorama du sommet tient au fait que les autres géants du coin sont éloignés de la Pointe de Méan Martin, celle-ci étant assez excentrée par rapport au reste du Massif de la Vanoise notamment.
En direction de la Pointe des Ronces / Ombre de la Pointe de Méan Martin.
Champ de pierres sur l'arête de la Pointe de Méan Martin.
Le célèbre duo de la Vanoise : la Grande Casse 3855m et la Grande Motte 3653m.
Les crevasses du Glacier des Roches Blanches.
Au-dessus du Vallon de la Rocheure. On voit particulièrement bien la séparation entre le monde des alpages et le monde minéral.
On retrouve l'arête Nord-Ouest, sous le soleil cette fois-ci.
Le Glacier des Fours et ses multiples lacs glaciaires.
Dernière partie en dévers dans le pierrier. On doit rejoindre le cairn présent sur l'arête et que l'on devine légèrement à droite de la Grande Motte.
On repasse près du Col du Pisset puis on poursuit notre route en direction du Col de la Rocheure. Pour cela, on doit contourner par le Nord la Pointe du Pisset 3033m pour retrouver le sentier cairné. On traverse d'immenses champs de pierres où se nichent quelques lacs anonymes.
Le Lac de la Rocheure et à droite le Col éponyme 2911m (aussi appelé Guécées de Tignes).
On quitte définitivement le Vallon de la Rocheure et le versant Maurienne de la Vanoise pour chuter sur les Alpages des Pissets, côté Tarentaise. Cependant, au lieu de rejoindre directement le Hameau du Manchet en empruntant le Vallon du Pisset, on rallongera la course en rejoingnant le Vallon du Charvet par un sentier longeant la base de la Pointe de la Sana.
On s'échappe peu à peu du milieu minéral pour traverser les alpages en aval des Pointes des Lorès, à droite.
Dernier clin d'oeil à la Grande Motte.
Les marmottes sont en nombre dans les alpages de la Vanoise. Elles ont encore quelques semaines pour s'engraisser avant l'hiver.
Sous la Pointe de la Sana 3436m et les moraines du Glacier des Barmes de l'Ours.
Petit regard en arrière sur la Pointe de Méan Martin avant de plonger dans le Vallon du Charvet. Le sommet semble bien loin, mais l'absence de forte montée et de forte descente permet d'enchainer facilement les kilomètres dans ces vastes espaces. On entame donc l'ultime descente entre la Montagne du Charvet et le Rocher du Mont Roup.
Le Vallon du Charvet avec la Tsanteleina en toile de fond.
Les animaux d'alpages remplacent peu à peu les animaux sauvages.
Et les immeubles, les chalets et les grues remplacent peu à peu les lacs, les torrents et les alpages en fond de vallée.
La proximité d'une grosse station de sports d'hiver ne doit pas décourager à découvrir les coins sauvages qui s'y trouvent à proximité. Dans le cas du Vallon des Fours et de la Pointe de Méan Martin, à l'instant où l'on franchit la délimitation du Parc National de la Vanoise, on se retrouve immergé dans un environnement calme, inapprivoisé et splendide. Aspects que la fin de la haute saison et l'ascension d'un sommet relativement isolé ne font que décupler.
ITINÉRAIRE DE LA RANDONNÉE :
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