Réalisée le 01-02 août 2022
Paradis de l'alpinisme, le Massif des Ecrins comprend des dizaines de sommets dépassant allègrement les 3000m voire les 3500m. C'est également le seul massif français, en plus de celui du Mont Blanc, à passer la barre des 4000m. Mais voilà, nous ne sommes pas des alpinistes et c'est en simples randonneurs que nous nous rendons dans le Parc national des Ecrins.
Si les principaux sommets de ce massif sont accessibles soit par une course glaciaire soit par des arêtes rocheuses, il existe quelques sommets secondaires à la portée des randonneurs. Des sommets qui, parfois, atteignent et dépassent l'altitude de 3000m. C'est le cas de notre objectif du week end : le Pic Turbat 3028m.
Ce sommet peu connu surplombant le Valjouffrey au Nord et le Valgaudémar au Sud pâtit de la renommée de son imposant voisin : l'Olan 3564m. Légèrement excentrée des autres géants des Ecrins, l'Olan se caractérise par son immense face Nord qui chute de plus de 1000m, ce qui lui vaut d'être reconnu comme l'une des plus grandes faces Nord des Alpes. Quant à lui, le Pic Turbat se situe à l'Ouest du colosse de roche, 500m plus bas.
Vous l'aurez compris, le panorama vers l'Est depuis le Pic Turbat risque d'être bouché par l'Olan. Mais les trois autres points cardinaux sont largement dégagés. De plus, par sa proximité avec l'Olan, c'est une vue plongeante sur sa face Nord que nous offre le sommet du Pic Turbat. C'est donc au départ de la Chapelle-en-Valgaudémar que nous nous mettons en route vers le pied de l'Olan. Le Valjouffrey aurait pu être choisi comme lieu de départ pour une première ascension de ce sommet, on s'appliquera à réaliser ''la voie normale''. On se réservera l'ascension du Col Turbat pour une prochaine fois, cet itinéraire étant beaucoup plus escarpé.
C'est dans la chaleur étouffante des fonds de vallée alpins que nous débutons ce tour qui nous fera côtoyer deux refuges, trois cols et un sommet de plus de 3000m. L'expérience alpine sera au rendez-vous.
Jour 1 : De la Chapelle en Valgaudémar au Lautier par le Refuge et le Pas de l'Olan.
Le premier objectif de la journée est d'atteindre le Refuge de l'Olan après un dénivelé positif de 1200m. Dès le départ, l'absence de forêt, l'inclinaison de la pente et l'exposition du versant rendent les premiers lacets éprouvant. Heureusement l'eau est encore bien présente dans le Massif des Ecrins.
On reste non loin du Torrent de Combefroide. Il permet de nombreux ravitaillements en eau.
Après quelques centaines de mètres de dénivelés, un autre géant du Valgaudémar apparait : le Sirac 3441m et son petit Glacier de Vallonpierre.
De l'autre coté du Valgaudémar, ce sont le Pic de Parières 3076m et le Vieux Chaillol 3163m qui s'imposent.
L'ascension du Pic Turbat sera effectuée en deux jours. Histoire de profiter d'une nuit fraiche en montagne. C'est au Lautier que nous décidons de nous diriger pour planter la tente. Mais nous ne sommes pas pressés. Nous ne montons donc pas directement vers le lac. Au contraire, au niveau d'une bifurcation, nous nous engageons vers le Refuge et le Pas de l'Olan en continuant de longer le Torrent de Combefroide. Pour aller vers le Lautier, nous aurions pu monter directement en longeant le Torrent du Clot. L'attrait de la face Sud-Est de l'Olan et son Pas, un des plus beaux cols du Massif des Ecrins, n'y sont pas pour rien.
Après quelques ressauts rocheux, on atteint un alpage totalement grillé par la sécheresse. L'inclinaison de la pente y est moins forte et l'amont de Combe Froide se dévoile plus amplement. L'Olan à gauche et son refuge au centre droit sont de la partie.
L'Olan et son refuge. Sous sa cime, le Glacier de l'Olan vit ses dernières années.
Pour atteindre le Lautier depuis Combe Froide, c'est un tour des pointes rocheuses (photo de gauche) que nous allons effectuer. Nommé les Archers, cet enchainement de pics acérés cache le Pas de l'Olan pour le moment.
Une fois au Refuge de l'Olan 2344m, une pause boisson et manger est de mise. La vue sur le Valgaudémar est spectaculaire. On plonge de plus de 1000m vers la vallée. Construit en 1958, le Refuge de l'Olan est malheureusement détruit par une avalanche à l'hiver 1960. Il sera reconstruit en 1966 et son architecture s'adaptera aux risques de la zone. Ancré dans la montagne, avec un toit plat, il ne peut que mieux résister aux avalanches qui balaient cette vallée chaque hiver.
Vue depuis la terrasse du Refuge de l'Olan. Alors que le Vieux Chaillol s'impose au loin, le Massif du Dévoluy s'immisce dans le paysage tout à droite avec le chainon de la Montagne de Faraut.
Entre Vieux Chaillol et Olan.
Depuis le Refuge de l'Olan, une petite heure de marche nous sépare du Pas éponyme situé au coeur de l'immense brèche présente à gauche de la photo. En contrebas, une partie du sentier est visible sur les pentes herbeuses du cirque glaciaire.
En quittant le refuge, le cirque glaciaire de Combe Froide se révèle encore davantage. Sur la droite les falaises de la Rouye 3084m plongent vers le Refuge de l'Olan.
Zoom sur la Rouye.
En face, les alpages des Ecrins hésitent entre les teintes de jaune et les teintes de vert.
Après quelques gradins herbeux, on atteint le pierrier final.
Quelques cumulus orographiques viennent surplomber les cimes des Ecrins. Sur la droite, l'un d'entre eux s'enroule au-dessus de la Cime du Vallon 3409m.
Clin d'oeil au Sirac depuis le Pas de l'Olan 2683m.
Les Archers scindent le Valgaudémar en deux : à gauche le Sirac et l'Aiguille de Morges, à droite le Dévoluy comble la vallée.
Au centre de la photo, au loin, le Grand Ferrand termine l'arrière plan.
Une fois au Pas de l'Olan, le Lautier n'est pas encore à côté de notre position. Il faut descendre les pierriers des Ruines avant d'effectuer une traversée en balcons au-dessus du Vallon du Clot pour atteindre le Col de Colombes que l'on aperçoit au centre droit sur la photo ci-dessus. Le lac se trouve juste derrière. Il s'agit par ailleurs d'une variante du GR54, le Tour de l'Oisans et des Ecrins. Sur la droite de la photo, le Pic Turbat fait également une timide apparition.
De l'autre côté du Pas de l'Olan, il faut par moment poser les mains sur la roche. Mais rien de bien impressionnant. Une dizaine de mètres plus tard, on met pied sur le pierrier.
Le Pas de l'Olan est beaucoup plus abrupt sur son versant Ouest. On accède au col par la faille que l'on distingue sur la gauche de la photo.
L'Olan est toujours parmi nous. Sous son sommet Sud, la moraine du Glacier du Clot.
C'est parti pour la traversée jusqu'au Col de Colombes. Le Pic Turbat devient plus imposant à mesure que l'on s'approche de sa cime. Cette traversée en balcons n'est pas très bien indiquée. Il faut faire attention au croisement qui est barré par quelques rochers. Le présence de nombreux ravins et couloirs d'avalanches ont surement conduit à ne pas faciliter l'accès à ce sentier. Il s'agit pourtant bel et bien de la variante du GR54 inscrite sur les cartes IGN.
Traversée du ravin du Torrent du Clot face au Vieux Chaillol.
Mis à part quelques ravins, le sentier ne présente pas de difficulté à cette saison et on atteint assez facilement le Col de Colombes.
L'Olan depuis le Col de Colombes 2423m.
La partie basse du Valgaudémar.
Le début de l'ascension du Pic Turbat se trouve au niveau du Col de Colombes. Mais la montée au sommet est prévue pour le lendemain matin. On se dirige donc vers le Lautier pour y planter la tente.
Le Lautier 2363m.
Ce lac n'est pas épargné par la sécheresse qui sévit sur les Alpes françaises. Bien que sa source soit probablement souterraine, le déversoir du Lautier est à sec. Conséquence du probable tarissement de sa source. L'absence de renouvellement de l'eau le réchauffe. La baignade et la douche dans son bassin ne sont aucunement difficiles et sont même agréables.
Parés pour la nuit.
A l'Est, les cumulus prennent confiance et grossissent petit à petit. Mais la météo a été formelle : pas d'orage de prévu !
Quelques buttes rocheuses surplombant le bivouac permettent d'apprécier la vue sur le Valgaudémar.
Les deux extrêmes nous encerclent : le point culminant du coin et le fond de vallée.
De gauche à droite : le Plateau de Bure, la Montagne de Faraut, la Tête du Garnesier, la Tête de Vachères, le Rocher Rond, la Tête de Vallon Pierra et le Grand Ferrand.
Les quelques cirrus alternent les moments à l'ombre et au soleil au fur et à mesure de la descente de l'astre vers l'Ouest.
On file se réchauffer dans la tente y déguster nos plats lyophilisés. Mais la luminosité du ciel nous fera vite retourner sur les rochers au-dessus de la tente pour contempler le spectacle des dernières lueurs sur les sommets des environs.
L'Olan se pare de rouge.
Les cirrus s'enflamment à leur tour.
Spectacle vers le Sud.
Zoom sur le Vieux Chaillol où quelques nuages tentent de le saupoudrer.
En direction du Col de la Vaurze (au centre).
Puis le orange et le jaune laissent place au rouge et au rose.
Le Pic des Souffles 3098m (à droite) n'en croit pas ses yeux.
Le Dévoluy n'est pas en reste sur les couleurs du coucher du soleil.
Le Grand Ferrand et le Pic des Souffles.
La luminosité baisse et la Lune prend place dans le ciel alpin.
Dernier éclat du soleil avant la nuit.
Jour 2 : L'ascension du Pic Turbat et la descente par le Refuge des Souffles.
Le réveil est prévu à 5h30, non pas pour profiter du lever du soleil au sommet du Pic Turbat qui s'élève 700m plus haut. Mais pour anticiper la longue descente qui nous attend entre le sommet et le fond de vallée. C'est donc aux aurores que nous ouvrons les yeux. Le ciel s'éclaircit déjà à l'Est. On laisse notre tente puis nous nous attaquons à l'ascension du mont.
Les chamois paissent tranquillement près du Col de Colombes.
Le soleil ne devrait pas tarder à frapper les premiers sommets.
Le bouquetin du coin profite également des premières lueurs au-dessus de l'Olan. Pas de traces des chamois vus au réveil.
Le face à face.
Le Sirac et le Pic des Souffles sont les premiers chanceux.
Au tour du Vieux Chaillol.
Petit à petit, le Dévoluy se laisse envahir par les rayons lumineux alors que le Valgaudémar patiente dans l'obscurité.
L'ombre de l'Olan s'étale au pied du Pic Turbat. Au loin à droite, le Sud du Massif du Vercors apparait.
L'ascension du Pic Turbat ne présente pas de difficultés majeures. Un sentier, quelques traces rouges sur les rochers et des cairns aident au repérage. On alterne petit couloir de roche et pierrier. C'est seulement sur les dix derniers mètres que le vide est bien présent. Quelques pas avec les mains sont nécessaires pour évoluer dans les blocs jusqu'au sommet.
L'Olan depuis le sommet du Pic Turbat 3028m.
Le sommet du Pic Turbat est double. Les deux petites pointes sommitales sont facilement accessibles et un cairn trône sur la première. Même une fois au sommet, on se trouve toujours dans l'ombre de l'Olan. On patiente quelques instants en contemplant le panorama le temps que les rayons lumineux effleurent cette cime et nos têtes fatiguées.
En direction de la Roche de la Muzelle 3465m. A gauche, une partie du Massif du Taillefer avec le chainon du Grand Armet notamment.
En direction du Dévoluy et du Vercors : Grand Ferrand, Tête de l'Aupet, Grande Tête de l'Obiou, Glandasse, Bonnet de Calvin, Montagnette, Mont Aiguille, Grand Veymont.
Du Vieux Chaillol au Pic des Souffles. La quasi totalité du Dévoluy est visible depuis le sommet du Pic Turbat. A droite du Plateau de Bure, on devine même les pentes du Mont Ventoux.
C'est enfin à notre tour d'en profiter !
Quelques minutes au soleil et quelques barres de céréales englouties puis c'est le moment de retourner vers le lac. La tente nous attend, le café aussi.
Première photo : Vue vers le Nord et seconde pointe du Pic Turbat / Seconde photo : Vue vers le Sud et le pierrier menant au sommet.
On dévale tranquillement l'arête de blocs avec la Roche de la Muzelle en toile de fond.
Puis dans une ambiance réchauffée, les deux compères descendent petit à petit vers le Lautier.
Le Lautier apparait au passage d'une crête. Les randonneurs ne l'ont pas encore pris d'assaut.
Le Valgaudémar est maintenant baigné par les rayons du soleil.
De retour au lac, nous démontons la tente, nous buvons notre café et nous profitons de ses eaux pour remplir nos gourdes qui sont maintenant à sec. Cependant, nous faisons bien attention à ne boire qu'à l'aide de notre gourde filtrante, un chamois mort ayant été repéré près du lac quelques jours auparavant.
Le calme du Lautier, avec le reflet du Pic des Souffles.
Il est un peu plus de 10h du matin et nous entamons la descente en direction du Valgaudémar. Là encore, nous aurions pu redescendre plus directement vers la vallée en empruntant le Vallon du Lautier mais nous décidons de poursuivre notre route pour relier le Refuge des Souffles, caché dans le vallon suivant.
On part vers l'Ouest, vers le Refuge des Souffles.
Face au Dévoluy. Au pied de la Montagne de Faraut, on observe le croisement du Valgaudémar et du Champsaur. Au fond de cette dernière, la route Napoléon file soit vers Gap, soit vers Grenoble.
Sous le Pic des Souffles, le sentier zigzague en direction du Col des Cochettes, notre prochain intermédiaire avant de chuter vers le Refuge des Souffles.
La cime dentelée du Pic des Souffles 3098m.
Après le Col des Cochettes 2183m, on plonge de 200m pour atteindre le Refuge des Souffles perché à 1968m. Il se cache dans un cadre bucolique, à l'entrée du mélézin. Au niveau du refuge, on quitte la variante du GR54 pour mettre directement pied sur le GR. Prochain objectif : Villar-Loubière.
Le Ravin des Arraches nous fait face pendant la descente avec ses imposantes falaises d'ardoises.
La forêt est assez clairsemée. La chaleur s'engouffre dans le sous-bois à mesure que nous descendons de la montagne.
Heureusement quelques ilots de fraicheurs sont présents en amont de Villar-Loubière.
Une fois arrivés au village, il nous reste tout de même 4km de marche à effectuer au niveau du talweg du Valgaudémar. On suit en partie de GR54 en direction de la Chapelle-en-Valgaudémar puis on remonte les bords de la Séveraisse jusqu'au départ pour le Refuge de l'Olan, à la sortie du village.
Attention, ne pas emprunter le sentier indiquant ''La Chapelle en Valgaudémar'' légèrement en amont du village de Villar-Loubière. Ce panneau indique 7km jusqu'à la Chapelle. Si vous traversez le village de Villar-Loubière, que vous marchez 200m sur la route goudronnée puis que vous suivez le GR54 en fond de vallée, les panneaux n'indiqueront plus que 4km. L'autre sentier effectuant une traversée en balcons au-dessus de la vallée.
Même au fond de la vallée, les cimes du Valgaudémar nous font de l'oeil.
Près de 24h après le départ de la veille, nous atteignons le parking. La fraicheur matinale à 3000m nous manque déjà. Cette randonnée peut s'effectuer à la journée, mais au vu du dénivelés (2400m) et de la distance (25km), un départ tôt dans la matinée est préférable. Une nuit à l'un des deux refuges du parcours peut également être envisagée pour profiter de l'ambiance conviviale de ces abris d'altitude. Dans tous les cas, le Valgaudémar saura répondre à vos attentes. Si les sentiers empruntés en direction des refuges ou le GR54 sont assez courus, l'ascension du Pic Turbat est sauvage et offre un panorama vaste et peu habituel sur le Massif des Ecrins et l'Ouest des Alpes françaises. Une belle découverte !
ITINÉRAIRE DE LA RANDONNÉE :
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